dimanche 29 décembre 2019

Le ballon ovale qui fait rêver les filles

Voici un reportage qui reflète bien le contexte dans lequel je vis puisqu'il est question ici de la population laissée pour compte qui habite le sud de l'île.

Saisissez donc l'occasion de voyager et de vous documenter sur cet environnement féroce dans lequel vive trop de jeunes. Une situation que le sport et plus particulièrement le rugby ici aura l'audace de défier.

A voir absolument :


https://www.youtube.com/watch?v=2FlQ-GqqTws&list=PLl6cdsNGmaxbTpoLWAt210yJTS9HXXCPY&index=11&t=0s

samedi 28 décembre 2019

Avec vous.

Je pourrais bien prendre le taxi-brousse avec vous.
j'ai partagé vos repas et vos fêtes. 
j'ai appris votre langue si belle, si brûlante. 
J'ai transpiré l'été et frissonné l'hiver avec vous. 
J'ai appris votre manière de travailler. 
J'ai reçu des parents et une famille singulière, comme vous. 
J'ai veillé les nuits de maladies et de deuils avec vous.
Je me suis intégré à votre façon de vivre, d'être et d'interagir
Je me suis épris d'amour de joie et de tristesse, comme vous, avec vous.
J'ai choisi de suivre un chemin, que pourtant, peu d'entre vous prennent sur la terre des hommes.
Je me suis fait l'un de vous, comme vous, avec vous.
J'ai choisi de vivre au milieu de vous, si proche que vous, en vous. 
Je suis toujours avec vous.  
Je suis né un jour du temps.
Je suis petit enfant. 
Le monde m'appelle Jésus.
L'Eglise fait mémoire de ma naissance, de ma mort et de ma victoire sur la mort jusqu'à présent. 
Je suis Le Seigneur et Je Sauve Avec Vous. 

jeudi 19 décembre 2019

Aza fady Madagasikara


Durant l'Avent je me suis facilement passé de bougie, de chèche, et même marché de Noël ! Par contre, une rengaine m'est restée dans la tête : "préparez les chemins du Seigneur, rendez droit ses sentiers". Jean Baptiste ne chantez pas au seuil des chaumières hivernales mais dans le désert. Son prédécesseur laisse aussi dans la Bible un héritage exceptionnel : "Il jugera les petits avec justice; avec droiture, il se prononcera en faveur des humbles du pays". Il n'y a pas de quoi faire la chansonnette non plus. Pourtant, ces paroles me travaillent comme la terre ici est remuée pour la saison des pluies. La question de la justice me préoccupe et je voudrais partager ce qui me dérange lorsque je me déplace et que je vois ce pays morcelé par les inégalités sociales. Si je n'ai pas de chanson, j'ai tout de même un titre Aza fady Madagascar pour dire "désolé Mada" mais je ne peux pas baisser le yeux... 


Déforestation 
Sur la route, les collines et les plaines sont magnifiques mais une chose me manque. La déforestation est un problème majeur à Madagascar. Alors que je m'émerveillais devant les paysages offerts par l'Île rouge, je prends conscience de l'absence manifeste de forêt le long de la route. Ce constat est pour moi d'autant plus frappant car j'habite le sud du pays où cela inquiète les habitants. A Tuléar, Alphonse, un frère assomptionniste, ébéniste de formation, constate malheureusement ce cruel déficit de matière première. La rougeur de la terre malagasy n'est donc pas seulement lié à la forte teneur en fer mais en grande partie à la coupe agressive et sauvage des arbres au bord même de la route parfois. Le bois ainsi coupé est transformé en charbon de bois, le seul combustible utilisé dans les villages pour faire la cuisine.A cela s'ajoute les feux de brousses qui alimentent la croyance qu'une terre brûlée sera plus fertile. C'est un cercle vicieux ou une impasse : comment se dégager de l'utilisation du charbon pour préparer le sakafo (repas) ? Le reboisement prévu est une bonne initiative mais il faut remédier à cette déforestation au plus vite ! 


Centralisation
L'histoire récente de Madagascar montre que le pays s'est construit bon an mal an sur le système colonial. Bien que le peuple malagasy soit aujourd'hui un peuple libre, la politique a du mal à se démarquer du système français. Notamment, la centralisation. En effet, tous les papiers administratifs assez importants nécessitent un aller-retour à la capitale où les ministères sont déjà bondés du matin au soir.  Lorsque vous habitez à 50 km, ça passe... Par contre, si comme moi, vous apprenez depuis votre petit village que vous avez trois jours pour faire 1000 km et payer par vous même les frais de transports et des mauvaises nuits de sommeils, la centralisation devient pour vous une épine dans le pieds. Je ne conteste pas le système centralisé qui a ses avantages. Par contre, en abuser à ce point devient très contraignant et peu rendre la vie des gens plus difficile que ce qu'elle est déjà. Le ministère de la décentralisation porte bien son nom ici. Mais je me demande vraiment si son action est efficace. 

Corruption
Cela pose alors la question du fléau principal du pays. J'ai nommé la corruption généralisé. Je sais qu'il existe des milliers d'articles à ce sujet sur l'île (tapez "corruption madagascar") : exemple ici
Or à la vue de billets qui circulent comme si cela allait de soi, j'ai de quoi être surpris et choqué. Cela va des instances politiques les plus hautes à des choses banales. Par exemple, sur le chemin qui mène à Tuléar des postes de douanes sont installés. A chaque passage de taxi-brousse, un gendarme (dont la tenue imite celle des nos chers militaires en chemise bleu avec leur beau képi) sort de sa case. Une petite discussion s'engage avec le chauffeur et hop, voilà une somme de 5000 à 10000 Ar glissant des mains et permettant au véhicule de continuer la route. Evidemment les taxis-brousses ne sont jamais aux normes (passagers impactés comme du bétail et surcharge évidente des bagages sur le toit). Mais est-ce normal de voir l'argent filer ainsi à chaque poste de douane comme si de rien n'était ? 

En attendant le président... 
Ce thème se raccorde bien avec une conversation que j'ai eu lors d'un voyage avec un fonctionnaire hydro-géologue de Tuléar. Il dénonçait lui-même de voir que les châteaux d'eau installés par l'Etat  n'avaient pas été entretenus et que la population souffrait ainsi du manque d'accès à ce qui est la source de la vie. Pourquoi ? la corruption. Il faut aussi ajouter d'un part des paysans qui veulent garder l'espace routier pour la circulation de leur charrette. J'espère que je ne me suis pas trop plaint de l'exécrable qualité de la route Nationale 10. Cette dernière ne sera peut-être jamais mise en état car les éleveurs de zébus et le réseau de taxi-brousse ont trop d'intérêt à laisser la situation ainsi et rendant les habitants dépendant de ce système. Madagascar pose le problème de l'inertie. Les habitants s'habituent à attendre que les choses viennent d'en haut, c'est à dire du président (la croyance au système centralisé persiste). Or, à lui seul il ne peut pas tout faire ! De plus, si l'intérêt de l'Etat est inférieur à celui de la population locale, rien ne bougera car personne n'aura réclamé justice. 

Continuer quand même
Je crois avoir suffisamment insisté sur l'interdépendance des problèmes sociaux à Madagascar. Ce soir même je retrouve le taxi-brousse pour rejoindre Fianarantsoa. Je sais que c'est bientôt Noël et que le temps est à la fête. J'aimerais des fois ne voir que les sourires des enfants et cette solidarité tenaces qui lie les familles les plus pauvres. Désormais, c'est plus difficile à vivre et la colère me prends quelques-fois à la vue de tant de misère. Je sais que ma mission est là pour donner de l'espoir et c'est la raison pour laquelle je me lève tous les jours. Alors, je vous laisse avec cette vidéo qui voudrait résumer en quelques secondes ce que j'ai essayé d'exprimer : à la fois la beauté et la pauvreté. Noël est teinté de cette ambiguïté. 




Bon Noël à toutes vos familles ! 

PS. : Au cas où vous avez une bûche au Réveillons, vérifiez sa provenance...(avec la déforestation...) 


lundi 9 décembre 2019

"On ne sait pas ce qu'on va faire, mais on sait pourquoi...


Cette citation tirée de paroles d'une des stagiaires DCC cet été voudrait résumer ces lignes que j'ai écrites pour essayer de comprendre et mieux réfléchir ma mission à la lumière de l'histoire. A la racine de tout commencement il y a bien le "pourquoi ça a commencé" et ce qu'on peut faire avec ça ... 


Monseigneur Michel Canonne (1901-1911) est le premier assomptionniste à avoir assumé la charge épiscopale à l’heure où les religieux de la famille du Père d’Alzon s’étendaient dans le diocèse de Tuléar. Les Assomptionnistes sont arrivés dans le diocèse en 1953 pour y remplacer les lazaristes qui avaient déjà commencé la première évangélisation. Aujourd’hui, de nombreuses communautés chrétiennes ont vu le jour, non seulement à Tuléar mais dans tout le diocèse qui s’étend sur toute la région Sud-Ouest de la Grande Île. Les assomptionnistes ont donc largement contribué à l’établissement du Royaume de Dieu déjà-là et pas encore. Cette longue histoire se poursuit aujourd’hui par la mission dans les parties isolées du diocèse. C’est la mission dans la brousse dont la priorité est encore la première évangélisation. Rappelons ici qu’environ 40 % de la population malgache est chrétienne et se regroupent principalement dans les grandes villes dont Fianarantsoa est l’une des plus denses en termes de population catholique. Ainsi, la moisson est grande et les ouvriers sont peu nombreux. Pour diversifier les rayons d’actions de cette évangélisation, les religieux proposent en plus de l’animation de la vie paroissiale, noyau de toute communauté chrétienne (aurais-t-on tendance à l’oublier dans nos contrées européennes ?), des œuvres éducatives. Pourquoi ? Tout d’abord parce que l’éducation est une urgence à Madagascar. Mes observations compenseront peut-être quelques chiffres : chaque jour en me rendant à l’école, je vois bien que de nombreux enfants restent à la maison avec leurs parents par manque de moyen ou d’intérêt… le manque d’école est encore plus manifeste dans la brousse. C’est dans ce contexte qu’un réseau d’écoles de brousses a été créé et des professeurs formés spécialement pour la mission. En ce qui concerne le secondaire (collège-lycée), les mêmes difficultés s’appliquent en terme de moyens étatiques. A cela, il faut ajouter la question du niveau scolaire : plus on s’éloigne des centres urbains, plus le retard éducatif augmente. 


C’est dans ce contexte que le collège Monseigneur Michel Canonne a vu le jour en 2012. L’établissement assume franchement son cachet assomptionniste. Non seulement à cause du nom déjà cité plus haut, mais aussi en vue d’éduquer selon l’esprit de famille, d’excellence intellectuelle et de fraternité propre à la spiritualité des assomptionnistes depuis leur fondation dans un collège de Nîmes (devenu aujourd’hui collège Feuchères) en 1845. Le Père d’Alzon avait voulu donner à son premier collège la qualité d’un enseignement chrétien fidèle à sa tradition héritée des Pères de l’Eglise et à la fois ouvert sur son temps. Tout cela avait pour but de former des citoyens avertis, prêt à servir leur pays et contribuer à l’annonce de la Bonne Nouvelle dans un monde en plein bouleversement. A des milliers de kilomètres, les objectifs du collège sont sensiblement les mêmes. Evidemment, ici, tout élève motivé est accepté selon la quantité des places disponibles (le nombre ne cesse d’augmenter. Cette année 350 élèves collège et lycée compris pour une ville de 3000 hab.) qu’il soit chrétien ou non. Le collège défend le long combat d’une éducation de qualité là où les moyens matériels et financiers manquent. Les élèves doivent acheter eux même au collège leur matériel, histoire de les responsabiliser (même si les sommes ne peuvent être comparés avec les valeurs en France : un cahier = 0,30 cent € env.) Je pourrai citer d’autres exemples. Le but étant de rendre ces petits citoyens conscients que l’avenir est dans leur main. Cela étant dit, il nous faudra réfléchir plus tard sur l’égalité des chances entre les ruraux et les citadins dans cette vaste et grande Île où les inégalités sociales sont influencées en partie par les disparités géographiques.

Au final, je constate encore mon impuissance devant l'immensité de la tâche à accomplir. Ce que je fais, je ne sais jamais si ça prendra ou pas. En revanche, le fait que notre collège porte le nom de l'Assomptionniste qui a généreusement ouvert la mission à Madagascar est pour moi la confirmation qu'il est impératif de retrouver le goût d'aller vers l'autre (sans savoir la manière dont on sera accueilli). C'est bien ainsi que Dieu s'est avancé vers nous (sachant très bien que notre accueil ne serait pas le meilleur). Alors nous marchons modestement, certes, mais avec franchise, sur les pas de Celui qui se faisait le devoir d'aller dans les autres villages y porter Sa Voix et Sa Présence. Avec Jésus le Pourquoi s'est transformé en Pour QUI... Et ça change tout. Si vous partez un jour vous saurez toujours pour qui même si le pourquoi vous échappe... 

Comment m'aider pour que des enfants aillent à l'école et donne à Madagascar de nouveaux espoirs ?

Maintenant que je suis en France, je ne stoppe pas mon action  pour les enfants de la Grande Île à avoir un accès à une éducation de qualité...