lundi 23 mars 2020

Ne sais-tu pas?


Je suis né dans un monde en métal et en béton
Alors ne me parle pas de planter des oignons
Tu me dis « tu ne sais pas » et toi que sais-tu de moi ?
A comparer nos existences on en vient à tuer notre seul chance de nous dire « oui »
Ne va pas te projeter dans une histoire que tu ne connais pas, car, comme la tienne ma vie est singulière.
Ne viens pas me dire « tu ne sais pas » car toi que sais-tu de mes souffrances invisibles et subies !
Ne joue pas à ce jeu, comparerais-je la souffrance de la faim avec la douleur de ne pas se servir de ses mains ?
Planter la bêche je ne sais, arroser je ne sais, m’asseoir et contempler je ne sais, se contenter d’une amitié je ne sais.
Tu n’as pas le droit de me juger car toi aussi un jour tu seras étranger
Si tu en restes-là ne bouge pas de chez toi et baisse d’un ton ta voix
Je te déconseille de venir chez moi, non pas seulement à cause du froid dehors
Mais du froid au-dedans car ça aussi il a fallu s’y faire
L’hiver d’un cœur qui n’a jamais appris à voir en l’autre la vie
Ne le sollicite pas si fort, ne lui demande pas de sourire encore
Laisse lui le temps de l’énervement mais ne le décourage pas
Tu sais que tu as cette force en toi alors ne l’utilise pas pour désarmer le vazaha
Il est venu pour toi, pour te rencontrer mais tu sais aussi qu’il peut vite se contrarier
Cesse de lui faire peser le poids d’un passé qu’il n’a pas à devoir assumer
Seul, il est venu avec son histoire personnelle
Ne lui dit pas qu’il ne sait pas car pour toi ce serait reculer
Transforme ton jugement en question « ne sais-tu pas ? »
Chez moi l’injonction nous a tant freiné
Ne fais pas semblant d’être gentil avec moi
Sois toi-même car c’est ainsi que la rencontre portera son fruit
S’il te plait ne me reproche pas de ne pas savoir cultiver, bricoler, jouer au foot ou au volley. 
Quand on est né dans le métal cela fait déjà suffisamment mal.
Non je n’ai pas appris à vivre comme toi les mains dans la terre et à partir à la recherche de nourriture pour ma survie. Ne me reproche pas d’être né là où je suis né. 
Personne ne choisit ni sa famille, ni ses limites
Mais c’est pour défier le destin que nous allons nous donner la main.
Je ne suis pas naïf, entre nous la barrière subsiste et dans nos pensées nous savons-nous autrement qu’étrangers ?
Pour moi c’est difficile et pour toi ?
Jusqu’où irons-nous pour faire un morceau de route ensemble ?
Je ne me fais pas d’illusion c’est de poussière et de terre que nous sommes faits.
Mais Un Autre nous a fait pour nous mélanger. Cela peut comme pour moi t’insupporter. Mais nous n’avons pas le choix. C’est pour ça que je suis là parce que je n’ai pas choisi et que c’est comme ça que je te reçois. En cela je te rejoins !
Quand je partirai que restera-t-il de moi dans ta mémoire ? La couleur de ma peau, mon comportement d’occidental, ou bien te souviendras tu qu’avec toi j’ai marché, j’ai douté et j’ai aimé et que ces choses-là sont propre à notre humanité ?
Quand viendra-t-il le temps ou nos yeux verront pour de vrai ? Personnellement j’ai hâte d’avoir à dépasser tout ce tas d’apparences pour te recevoir et t’aimer sans compter toi qui m’appelais « l’étranger ».
Il y a dix ans qui pouvait imaginer notre rencontre. 
Pourtant nous voici toi et moi si proche dans ce taxi, dans cette église autour de la même table. Ferme les yeux, je vois la même nuit que toi. 
Ouvre tes mains que je m’y repose enfin.

mardi 17 mars 2020

Ces temps étranges



Au cours du mois de mars, une étrange maladie se propage dans le monde et aucune frontière ne semble l’arrêter. Madagascar à l’heure où je rédige cet article est à l’abri. Mais qui peut prévoir l’évolution de la situation qui s’est aggravée de semaine en semaine dans le monde. Notre Président a pris un air grave et à cinq reprise à déclarer un état de guerre. Comment interpréter un discours martial comme celui-ci. Je n’aime pas que l’on joue avec le mot « guerre » ? Peut-on vraiment se passer de ce champs lexical alors que l’organisme humain lui-même créé des anticorps pour luter ? Plus personne ne sait vraiment à quoi s’en tenir. Doit-on tout verrouiller au moindre symptôme ? Où prendre le ton de l’ironie comme certains citoyens londoniens entendus à la télévision ? Je suis d’autant plus attristé de la situation car j’ai habité trois ans en Alsace, là où les cas sont les plus nombreux. Depuis Madagascar, on voit les choses autrement. A Ejeda, le niveau d’accès à une information de qualité est faible et il faut être indulgent envers ceux et celles qui rient de cette maladie. Ici, les gens connaissent bien pire qu’un confinement de 15 jours. Ici l’espérance de vie ne dépasse pas les 70 ans et la mortalité infantile reste élevée. L’arrivée d’une telle pandémie serait une catastrophe sur l'île qui n’a pas vraiment les moyens d’offrir un confinement et les soins adapté à tous ses habitants. Les frontières qui se ferment répondent à cette peur de ne pas savoir gérer une contamination du pays. Avant de terminer, je voudrais souligner que ce genre d’événement peut provoquer une interprétation trop rapide : dans mon entourage proche, j’entends que c’est la maladie des blancs et des volontaires  français en Afrique sont témoins de passants qui toussent en riant à leur passage. Attention, la vraie maladie sous-jacente au COVID-19 ne serait-il pas un racisme qui dort et un mépris de l’autre, de l’étranger (et de la vient étrange) qui ne m’apporte rien que des problèmes ? Cette maladie n’a pas encore de vaccin et elle fait toujours des ravages dans l’Histoire. 
La fraternité est le défi que soulève l’événement. C’est là que nous pouvons dire, entrons dans le combat de Dieu selon les mots de S. Paul. Bon carême et que Pâques soit une fête de communion quoi qu’il arrive.

Comment m'aider pour que des enfants aillent à l'école et donne à Madagascar de nouveaux espoirs ?

Maintenant que je suis en France, je ne stoppe pas mon action  pour les enfants de la Grande Île à avoir un accès à une éducation de qualité...